MYOPATHIES METABOLIQUES

 LES LIPIDOSES

 

Cas clinique

      1987

Monsieur L., 34 ans, cycliste amateur, sans ATCD

 

Bilan annuel d’aptitude de son activité physique dans le service des EFR du CHRU de Lille

 

Examen clinique normal

 

ECG normal

Cas clinique

Epreuve d’effort : VO2 max 57.9 ml/min/Kg

                              

       repos : 1,73 mmol/l

      120 watts : 2,19 mmol/l

      180 watts : 3,57 mmol/l

      220 watts : 7,53 mmol/l

      12ème minute de récupération : 1,6 mmol/l.

Cas clinique

      1988

Epreuve d’effort identique ; récupération moins bonne : persistance d’une lactatémie à 2,91 mmol/l à la 12ème minute de récupération

 

      1989

Amélioration de la VO2 max

 

      Puis perdu de vue

Cas clinique

      1997

44 ans

Myalgies en fin de compétition

Récupération plus lente avec des épisodes myalgiques persistant plusieurs jours après des courses longues

Un épisode d’urines rouges il y a 2 ans, suite à une compétition, non exploré.

ECG : onde Q significative dans le territoire inférieur  

 

Cas clinique

Epreuve d’effort :

     VO2 max 61.4 ml/min/Kg

     ECG : pas de signe d’ischémie

 

Echographie cardiaque, scintigraphie myocardique, coronarographie normales

 

Epreuve d’effort métabolique : rapport L/P élevé au maximum de l’effort (61) et en récupération (49)

Cas clinique

Biopsie musculaire : déficit enzymatique en carnitine et en Carnitine Palmityltransférase 2 (CPT 2)

 

Conclusion :

* Déficit primaire en Carnitine et en CPT2 à révélation tardive, exacerbé par la pratique sportive intensive

* Cardiopathie sous jacente probable révélée par la présence d’une onde Q

Cas clinique

Traitement

      Apport exogène de L-carnitine (50-100 mg/Kg/j)

      « apports AG à chaînes longues

      Privilégier la voie métabolique du glucose (apports alimentaires) lors des efforts violents

MYOPATHIES METABOLIQUES

 LES LIPIDOSES

QUELQUES RAPPELS

Acides gras (AG) = principal substrat énergétique musculaire

     - au repos

     - lors de l’exercice prolongé

     - lors du jeûne

 

AG dans l’alimentation = AG à chaînes longues (12 – 20 carbones)

 

 

 

 

 

L’oxydation des AG comporte 5 étapes :

1. Hydrolyse des triglycérides par la triglycéride lipase

2. Pénétration intracellulaire et transport intracellulaire par des protéines transporteuses spécifiques de tissus (fatty acid binding protein)

3. Activation cytoplasmique en Acyl-CoA par une acyl-CoA synthétase

4. Pénétration intramitochondriale à l’aide d’un système enzymatique comportant les carnitine palmityl transférase I et II, une translocase et un transporteur, la L-carnitine.

NB : les AG à chaine moyenne C6-C12 pénètrent directement dans la mitochondrie sans emprunter ce système de transfert dépendant de la carnitine.

5. â oxydation intramitochondriale par le complexe acyl-CoA deshydrogénase, comportant 4 étapes qui produisent des molécules d’acyl-CoA, NADH, FADH

 

 

Expression clinique des déficits d’oxydation des AG :

¨ atteinte hépatique avec hypoglycémie, hyperammoniémie, défaut de synthèse des corps cétoniques, stéatose aiguë, cytolyse, HMG

 

¨ signes musculaires de surcharge lipidique : faiblesse musculaire, accès de crampes, myolyse aiguë, myoglobinurie paroxystique

 

¨ atteinte cardiaque : cardiomyopathie progressive hypokinétique dilatée ou hypertrophique, troubles du rythme paroxystiques, collapsus et insuffisance cardiaque aiguë, mort subite

 

¨ signes cérébraux : coma, convulsions

 

 

Rôles de la carnitine :

-       Transfert des AG à chaîne longue dans la mitochondrie

-       Régulation de la dégradation des AG (â oxydation mitochondriale)

-       Evacuation hors de la mitochondrie des métabolites toxiques accumulés

 

 

 

 

 

 

Carnitine

Déficit en carnitine

Primaire (I) :

Déficit du transport actif de la carnitine (vers le muscle, le cœur, les reins)

Transmission AR

‚ mutations : OCNT2 = transporteur de cations organiques

 

¨ 1 forme infantile sévère

¨ 1 forme myopathique

Déficit en carnitine

Secondaire (II) :

-       Consommation excessive de carnitine (évacuation des métabolites toxiques accumulés du fait de la défaillance du catabolisme des AG (â oxydation) ou de la chaine respiratoire

-       « synthèse : homocystinurie

-       Perte urinaire de carnitine : cystinose

-       Acquis : cirrhose, dénutrition, sepsis, grossesse, nutrition parentérale exclusive, hémodialyse, traitement par valproate, traitement par zidovudine

Clinique

      Déficit musculaire à prédominance proximale +/- face, lentement progressif , hypotonie (I et II)

      Intolérance à l’effort (II)

 

      +/- épisode encéphalopathique avec atteinte hépatique (syndrome de Reye) => hypoglycémie sans cétose

 

      +/- atteinte myocardique

Diagnostic

      CPK modérément augmentés (en permanence)

      « carnitine sérique

      ª fraction estérifiée de la carnitine sérique (II)

      EMG : myopathie (I)

      Biopsie musculaire : surcharge lipidique à l’intérieur des fibres musculaires, « carnitine musculaire

 

 

Traitement

      Déficit primaire :

     régime pauvre en graisses

     L-carnitine (Lévocarnyl®) 2 à 4 g/jour

 

      Déficit acquis : L-carnitine 2-4 g/jours

 

      Déficit secondaire : L-carnitine + béflavine (vitamine B2)

Déficit en carnitine palmityltransférase I (CPT I)

 

Révélation dans l’enfance :

 

      Forme hépatique

      Forme musculaire : crampes à l’effort, myoglobinémie

Déficit en carnitine palmityltrasférase II
(CPT II)

      CPT II = enzyme ubiquitaire localisée au niveau de la membrane interne de la mitochondrie

      Transmission AR

      Gène localisé sur chromosome 1p32

      25 mutations connues

      60 % = substitution Ser113 Leu

      Premier cas rapporté en 1973 par DiMauro

 

(« activité CPT II chez des patients insuffisants rénaux chroniques avec hyperparathyroidie secondaire)

 

Clinique

      Forme hépato-cardio-musculaire infantile sévère

 

      Révélation à l’adolescence ou chez l’adulte jeune

     (‰>Š)

     - myalgies d’effort, faiblesse musculaire

     - myolyse à répétition déclenchées par le jeûne, l’exercice prolongé, le froid, l’infection, l’acide valproique

     - insuffisance rénale aiguë dans 25 % des cas

Diagnostic

      ªª CPK après effort +/- myoglobinurie +/- insuffisance rénale

      CPK normales ou modérement élevées entre les épisodes

      Carnitine sérique normale

      Épreuve de jeûne : élévation normale des cétones

      Elévation normale des lactates au cours du test d’effort en ischémie

      EMG normal ou non spécifique

      Etude des acylcarnitine en spectrométrie :

     ª ratio (palmitylcarnitine C16 + oléylcarnitine C18)

                   / acetylcarnitine C2

 

Diagnostic

      Biopsie musculaire :

     histologie : normale ou surcharge lipidique discrète

     enzymologie : « activité CPT II

 

      « activité CPT II au niveau des fibroblastes, des lymphocytes

 

      Etude génétique moléculaire

Traitement

      Régime riche en hydrates de carbone

      Utilisation d’huiles riches en AG à chaînes moyennes (dont l’incorporation est normale)

      Elimination de l’alimentation des AG à chaînes longues

      Eviter circonstances déclenchantes : jeûne, cure d’amaigrissement, effort prolongé

 

      Glucose IV améliore la tolérance à l’exercice

Déficit en carnitine-acylcarnitine transférase

      Enzyme de la membrane mitochondriale

      Transmission AR ; gène localisé sur le chromosome 3p21

      Début dans l’enfance

     ¨ encéphalopathie, cardiopathie, déficit musculaire

     ¨ hypoglycémie, hypocétonémie, hyperamoniémie

      Traitement : nutrition entérale, hypercalorique, pauvre en AG à chaînes longues

Déficit en VLCAD (Very Long Chain AcylCoA Dehydrogenase)

      VLCAD :

     - protéine située sur la membrane mitochondriale interne

     - premier pas de la â oxydation

     - présente au niveau du cœur, des muscles, du foie

      Transmission AR

 

¨ forme infantile sévère : encéphalopathie, hypoglycémie, cardiomyopathie hypertrophique

 

¨ forme hépatique : hypoglycémie hypocétonique

¨ forme myopathique de l’adolescent et de l’adulte jeune

Clinique

 

      Myalgies déclenchées par l’exercice et le jeûne

      Douleurs musculaires intenses

      Rhabdomyolyse

      +/- hypoglycémie, HMG, cardiomyopathie

 

Diagnostic

      ª CPK récurrente à l’effort

      CPK normales entre les crises

      Carnitine plasmatique normale

      Faible cétose de jeûne

      Etude des acylcarnitine en spectrométrie :

     ª C14 acylcarnitine

      Biopsie musculaire : normale entre les crises

      Etude de la VLCAD sur fibroblaste :

     - « quantitative des VLCAD

     - « activité de la VLCAD

Traitement

 

 

?

Déficit en SCAD (Short Chain AcylCoA dehydrogenase)

      SCAD hydrolyse les AG en C4-C6

      Transmission AR ; gène localisé sur le chromosome 12q22-qter

 

¨ forme infantile : - retard mental, hypotonie, faiblesse

                               musculaire

                                 - acidose métabolique, excrétion d’acide                    éthylmalonique

¨ forme de l’adolescent et de l’adulte

      Myopathie lipidique de surcharge

      Parfois associée à une ophtalmoplégie, à une muticore disease

      Déficit en SCAD sur la biopsie musculaire

Déficit en SCHAD (Short Chain L-3-HydroxyAcylCoA Dehydrogenase

      SCHAD : enzyme de la â oxydation

      Transmission AR ; gène situé sur le chromosome 4q22-q16

      Début dans l’enfance : rhabdomyolyse récurrente

      +/- encéphalopathie métabolique, hypoglycémie hypocétonique

      Déficit musculaire en SCHAD

Déficit multiple en acylCoA dehydrogenase

      Lié à un déficit en flavoprotéine (ETF = Electron Transfer Flavoprotein et ETF dehyrogenase)

      ETF : transporteur d’électrons à la chaîne respiratoire

      Transmission AR ; gène situé sur le chromosome 15q23-q25

 

¨ forme infantile: malformations, syndrome de Reye, hypoglycémie, myocardiopathie, dyskinésies

¨ forme de l’adulte

      Début vers 30-40 ans

      Myopathie proximale d’évolution subaiguë sur plusieurs mois

      Déficit musculaire parfois sévère

      +/- myalgies

      ª CPK

      EMG : tracé myopathique

 

 

      Biopsie musculaire :

     - myopathie vacuolaire traduisant une surcharge lipidique

     - taux de carnitine abaissée

     - réduction de l’activité catalytique du complexe mitochondrial I

 

      Traitement

     Riboflavine 100 mg/jour +/- L-carnitine

                               +/- corticoides

Déficit en MAD (myoadénylate désaminase)

Forme héréditaire

 

      Transmission AR ; gène situé sur le chromosome 1p21-p13

      3 mutations sont associées au associées au déficit en MAD :

     - C34T / T143C : présente chez 1-2 % de la population à l’état homozygote, et chez 10-20 % à l’état hétérozygote

     - G468T

     - R338W et R425H

 

 

      MAD = isoenzyme musculaire de l’AMP désaminase qui catalyse la désamination de l’AMP en IMP

 

      Rôles :

     - intervient dans le métabolisme énergétique de la cellule

     - rôle important dans le cycle des purines

 

 

Clinique

      Déficit en MAD souvent asymptomatique

 

      Révélation dans l’enfance, à l’adolescence ou à l’âge adulte (‰=Š)

 

      Symptomatique quand l’activité résiduelle < 2 %

     ¨ rhabdomyolyse

     ¨ myalgies d’effort (jambes et mains), crampes

     ¨ fatigabilité musculaire

Diagnostic

      CPK normales ou légèrement ª

      EMG normal

      Test d’effort en ischémie :

     - élévation normale des lactates à l’effort

     -absence d’élévation de l’ammoniaque

      Biopsie musculaire :

     - morphologie normale

     - histochimie : absence de coloration au niveau de toutes les fibres musculaires

     - enzymologie : activité de la MAD effondrée

      Etude génétique

Traitement

      D ribose 4g avant effort, à répéter si effort prolongé

      +/- L carnitine

Forme acquise

Coexistence d’un déficit en MAD avec d’autres maladies neuromusculaires ou métaboliques : polymyosite, sclérodermie, diabète, dysthyroidie

 

La MAD n’intéresse pas que les internistes

      Loh et coll. (Circulation 1999) ont montré un effet protecteur individuel de la mutation C34T du gène de la MAD vis-à-vis de l’insuffisance cardiaque